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MESSAGE PASTORAL POUR 2025
DIOCÈSE DE YAMOUSSOUKRO
Thème : La synodalité renforce notre fraternité
Au Clergé,
Aux consacrés,
Aux Fidèles laïcs du Christ,
Aux Personnes de bonne volonté,
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Vous tous, enfin, vivez en parfait accord, dans la sympathie, l'amour fraternel, la compassion et l'esprit d'humilité. Ne rendez pas le mal pour le mal, ni l'insulte pour l'insulte ; au contraire, invoquez sur les autres la bénédiction, car c'est à cela que vous avez été appelés, afin de recevoir en héritage cette bénédiction. En effet, comme il est écrit : Celui qui veut aimer la vie et connaître des jours heureux, qu'il garde sa langue du mal et ses lèvres des paroles perfides ; qu'il se détourne du mal et qu'il fasse le bien, qu'il recherche la paix, et qu'il la poursuive. 1 P. 3, 8-11 (AELF Bible version électronique)
1. Avec la famille, la fraternité est une des manières la plus significative d'être Église : Loin de s'opposer, ces deux visions qui se complètent, n'ont d'autre but que de nous permettre de mieux être Église. Dès lors, si c'est de la famille que nait la fraternité alors elle devrait davantage rendre compte de notre appartenance à une même et unique Église-Famille.
2. Loin de remettre en cause notre appartenance à une même famille, bien au contraire, notre fraternité au-delà de l'ethnie, de la tribu et des classes d'âge (Mèdéwalé-Jacob Agossou, 1987, p. 217) voudrait rappeler les liens spirituels très forts qui nous unissent. La fraternité au-delà de l'ethnie, sans pour autant remettre en cause nos liens de sang vient à coup sûr renforcer notre unité dans le Christ. C'est une manière de souligner combien nos liens spirituels qui font de nous les frères et sœurs d'un même Père dépassent infiniment nos liens de sang qui encore une fois revêtent une importance capitale à ne pas négliger. Car on vient toujours de quelque part.
3. L'évocation de la famille en lien avec la fraternité de sang voudrait tout simplement faire allusion à nos attitudes et comportements
excluant tous ceux avec qui nous ne sommes pas de la même ethnie ou de la même région ou encore du même pays. Cette fraternité de la chair peut être bel et bien qualifiée de tribaliste voire d'ethniciste véritable gangrène pour nos sociétés et dans l'Église. En effet, cette approche charnelle de la fraternité ne reconnait l'autre comme « adelphos » (frère) qu'à partir du moment où nous sommes du même « village ».
La nécessité de passer de l'ethnie à la fratrie
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Il s'agit alors d'effectuer le passage de l'ethnie à la fratrie telle que nous le décrit la Parole de Dieu. Seulement, il ne faut pas oublier que même dans la perspective biblique, on peut trouver des fraternités pas toujours édifiantes à l'exemple de Caïn qui a tué
son frère Abel (Gn 4, 8). Ce type de fraternité explosive devrait nous aider à comprendre que notre unité n'est jamais gagnée d'avance. Elle nous rappelle aussi que si nous voulons une fraternité qui consolide véritablement notre communion les uns avec les autres, nous devons tout faire pour la bâtir sur la pierre angulaire qu'est le Christ-Aîné (Rm 8, 29). Autrement, nous risquons de travailler en vain.
5. Et comme l'affirme le Christ, nous ne serons vraiment frères et sœurs que dans la mesure où nous savons écouter Sa Parole (LC 8, 21). Et c'est cette même Parole qui nous rappelle qu'il n'y a plus ni juif ni grec ni esclave ni homme libre, il n'y a plus l'homme et la femme ; car tous vous n'êtes qu'un en Jésus Christ (Ga 3, 28). C'est dire que notre unité est dans le Christ, notre fraternité a pour fondement le Christ.
La synodalité vient renforcer notre fraternité
6. Du 4 octobre 2023 au 27 octobre 2024 s'est tenu à Rome le Synode sur la synodalité. Ce grand événement d'Église a réuni autour du pape François : des cardinaux, des évêques, des prêtres, des personnes consacrées ainsi que des fidèles laïcs du Christ du monde entier. Ce synode sur la synodalité, on pourrait le définir en trois mots : écoute, dialogue et discernement. Mais n'est-il pas vrai que c'est dans un cadre familial et surtout fraternel que ces mots ont vraiment du sens ? En frères et sœurs du Christ (He 2, 11-12), nous avons acceptés de répondre généreusement à son appel, Lui qui nous envoie prêcher son Évangile, bonne nouvelle pour tous les peuples de la terre. Évidemment, la nature
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de cette entreprise missionnaire ne peut être que communautaire. De ce fait, il va de soi que c'est en frères et sœurs que nous sommes appelés à relever le défi de la mission.
Des Frères et sœurs qui s'écoutent
7. L'écoute est particulièrement déterminante dans notre vie chrétienne. En effet, sans l'écoute, il n'y a pas d'accueil de la foi (Rm 10, 17). Et le fameux « auditus fidei » dont fait cas l'apôtre Paul dans sa lettre aux Romains est surtout une écoute de ce que l'Esprit-Saint, principal protagoniste de la mission, dit aux Églises. D'où la nécessité vitale dans l'Église-Fraternité de se rendre docile à l'Esprit du Père et du Fils. L'écoute est ici synonyme de respect des convictions et du point de vue de chacun tant que cela ne nuit pas à la foi, à la doctrine et aux mœurs. C'est certainement cela qui nous donne la liberté, dans l'Esprit-Saint, de pouvoir dialoguer en toute fraternité.
Des frères et des sœurs qui dialoguent
8. N'est-ce pas le dialogue qui rend possible l'écoute ? Et l'écoute mutuelle, en retour favorise le dialogue. Sous ce rapport, on peut dire que l'importance du dialogue se situe à trois niveaux. Premièrement, il prévient les conflits. Deuxièmement, il aide à résoudre les conflits. Et enfin, il est en mesure d'enraciner et de renforcer la paix et la cordialité dans la communauté. Pour rappel, cette fraternité qui s'enracine dans l'Amour du Christ ne peut être que source d'unité. En outre, on sait combien le dialogue favorise
la participation de tous à l'œuvre missionnaire chacun selon la grâce et le talent qu'il a reçu. De la sorte, chaque fidèle trouve sa place dans l'Église où à l'image de la première communauté chrétienne personne ne se sent lésé ou délaissé ou encore livré
à lui-même (Actes 6, 1-2) : la pertinence du discernement tout comme le dialogue, c'est d'aider à trouver des solutions aux problèmes que rencontrent nos communautés. Non sans oublier que le propre du dialogue est de favoriser le partage d'autres expériences qui pourraient être enrichissantes pour tous. C'est aussi le propre du discernement qui dit notre soumission à l'Esprit-Saint.
Des Frères et sœurs qui savent discerner ensemble sous la mouvance de l'Esprit-Saint
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9. Ici encore le rôle de l'Esprit-Saint apparait de façon décisive. Car c'est Lui qui nous apprend à bien discerner. Ce discernement de type communautaire et ecclésial est important en ce qu'il nous aide à construire dans la synodalité, c'est-à dire ensemble, l'Église du Christ à nous confiée. L'entreprise missionnaire où l'Esprit-Saint a toute sa place nous fait alors prendre conscience que nous sommes de simples serviteurs, de simples intendants qui n'ont aucun mérite si ce n'est d'être appelés par pure grâce et à qui de surcroit il a été fait miséricorde. Conscients de tout cela, comment ne pas travailler à une plus grande communion entre nous ?
10. « Je demande à Dieu « de préparer nos cœurs à la rencontre avec nos frères au-delà des différences d'idées, de langues, de cultures, de religions ; demandons-lui d'oindre tout notre être de l'huile de sa miséricorde qui guérit les blessures des erreurs, des incompréhensions, des controverses ; demandons-lui la grâce de nous envoyer avec humilité et douceur sur les sentiers exigeants, mais féconds, de la recherche de la paix ». FT 254 in Homélie lors de la Sainte Messe, Aman Jordanie (24 mai 2014) : L'Osservatore
Romano, éd. en langue française (29 mai 2014), p. 5
11. In fine, en lien avec la fraternité, nous osons croire que la synodalité est bien « l'espoir d'une nouvelle manière de vivre et d'être Église Puisse-t-elle se renouveler en profondeur, pour plus de vitalité et de dynamisme au moyen de l'Esprit-Saint. Nous pourrons alors espérer une nouvelle Pentecôte d'Amour pour la plus grande gloire de Dieu et le salut de tous. Tel est notre souhait, tel est notre prière pour la nouvelle année. Que le Seigneur nous donne d'être plus frères et sœurs, dans l'unique Église-Famille de Dieu que nous formons, pour un témoignage authentique de foi dans la charité et la vérité. Bonne, Heureuse et Sainte Année 2025.
Yamoussoukro, le 27 décembre 2025
Joseph AKA
Évêque de Yamoussoukro